Aurélie MARCHES, du groupe LAPLACE-PRHE, soutiendra sa thèse intitulée « Traitements des plaies chroniques par plasma froid à pression atmosphérique : étude des mécanismes biologiques mis en jeu » le 20 Octobre à 15h en Salle Ruffié à INFINITY, Bâtiment C, CHU Purpan 31024 Toulouse.
Résumé
Le plasma froid à pression atmosphérique (CAP) est un gaz partiellement ionisé délivrant un cocktail thérapeutique d’espèces réactives de l’oxygène et de l’azote (RONS). C’est une technologie émergente avec un fort potentiel pour des applications biomédicales telles que la stérilisation des matériaux, la désinfection et des stratégies anti-tumorales. Il a également été démontré que l’application de plasma froid améliore la cicatrisation des plaies in vivo, mais les types cellulaires et les mécanismes biologiques impliqués ne sont pas bien connus. C’est dans ce contexte que nous avons fait l’hypothèse d’une action du CAP sur les kératinocytes de l’épiderme. Les objectifs de ce travail étaient de visualiser et d’analyser les réponses des kératinocytes au traitement par plasma froid, en utilisant un prototype de jet plasma d’hélium que nous avons récemment développé. J’ai tout d’abord testé les effets d’une application directe du CAP sur des kératinocytes humains cultivés en monocouches. J’ai ensuite traité les mêmes cellules de manière indirecte, en utilisant un milieu liquide activé par plasma (PAM). Finalement, le potentiel thérapeutique du PAM a été évalué à l’aide d’un modèle de blessure sur explants de peau humaine.
Dans un premier temps, nous avons étudié l’effet des traitements directs par jet de plasma d’hélium pendant 10 à 120 s sur des kératinocytes de la lignée N/TERT-1 et des kératinocytes primaires humains en culture 2D. J’ai évalué l’effet du CAP sur la viabilité, la prolifération, la différenciation et finalement la migration des cellules. J’ai aussi examiné les espèces actives générées par le traitement au plasma et étudié leurs effets sur les kératinocytes. Nous avons montré que l’exposition directe des kératinocytes humains au jet plasma d’hélium pour des durées supérieures à 60s est cytotoxique. Au contraire des traitements pour des durées inférieures à 60 s n’affectent ni leur viabilité, ni leur prolifération ni leur capacité de différentiation. Ils n’induisent pas de stress cellulaire majeur, notamment de stress thermique, n’affectent ni le potentiel de la membrane mitochondriale ni le fonctionnement des mitochondries, et n’influent pas les RONS intracellulaires. En revanche, ces traitements courts améliorent les capacités migratoires des kératinocytes. Ceci pourrait en partie expliquer l’effet pro-cicatrisant des traitements au CAP.
Dans un second temps, nous avons étudié les effets d’un traitement des kératinocytes de la lignée N/TERT-1 et des kératinocytes primaires humains en culture 2D pendant 1 h avec du PBS préalablement exposé au plasma pendant 10 à 120 s. La quantification des principaux RONS générées dans notre installation expérimentale indique que des concentrations micromolaires de peroxyde d’hydrogène, de nitrite et de nitrate ont été produites pendant l’exposition du PBS au plasma. Les traitements des kératinocytes en 2D avec du PBS activé pendant 60 s ou plus se sont révélés à nouveau cytotoxiques, ont réduit la migration des kératinocytes et ont induit un stress oxydant. Au contraire, les traitements avec du PBS activé pendant 10-30 s ne sont pas cytotoxiques, n’induisent pas d’altération des mitochondries, n’affectent ni la prolifération ni la différenciation des kératinocytes mais augmentent leur migration. Les effets observés semblaient indépendants des RONS produites. Une analyse protéomique quantitative globale a mis en évidence une expression accrue de plusieurs protéines connues comme impliquées dans la migration cellulaire. Finalement, un modèle de cicatrisation en 3D a été mis au point, des explants de peau humaine maintenus en culture pendant 1 semaine après une brûlure superficielle standardisée. Dans ce modèle, l’application de PBS activé pendant 20-30 s a accéléré la ré-épithélialisation.
Ces résultats montrent que le plasma froid améliore la cicatrisation en stimulant la migration des kératinocytes, et suggèrent une nouvelle méthode thérapeutique pour les blessures récalcitrantes.